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La ruee vers l’or à Shabunda pratiques et impacts de l’exploitation miniere par dragues

Observatoire de la société civile congolaise pour les minerais de paix /OSCMP

La ruee vers l’or à Shabunda pratiques et impacts de l’exploitation miniere par dragues

Shabunda, le plus vaste territoire de la Province du Sud Kivu, complètement enclavé d’accès routier, vit une ruée vers l’or. Deux rivières avec des sédiments riches en or traversent le territoire, la rivière Lugulu et notamment la rivière Ulindi. Depuis environ une année, les autochtones de Shabunda ont pu observer une hausse exponentielle des activités d’exploitation minière sur leurs rivières. Au moment de la publication de cette étude, 175 dragues suceuses, opérés par des équipes d’exploitants artisanaux, œuvrent en grande majorité sur la rivière Ulindi, ainsi que quatre dragues industrielles à chaîne à godets d’une entreprise chinoise. Malgré l’importance du phénomène des dragues à Shabunda en termes de production aurifère, mais aussi en termes d’impact nuisant sur le processus de paix et sur l’environnement, à la connaissance des auteurs, cette étude est la première qui se consacre à jeter un éclairage sur les pratiques des dragues. L’étude montre que les 175 dragues suceuses et les 4 dragues industrielles à chaîne à godets produisent 660 kg d’or par mois, ce qui revient à près de 8 tonnes par année. Toute cette quantité quitte le pays d’une façon illicite en enrichissant des groupes armés et des acteurs non éligibles du secteur minier. Depuis son inauguration solennelle en présence des autorités locales et provinciales en

septembre 2014, une société chinoise dénommée Kunhou Mining Group a commencé à exploiter dans une zone occupée par les Raia Mutomboki moyennant quatre dragues à chaîne à godets entièrement mécanisées. Malgré l’illégalité de son exploitation, la société chinoise mène des rapports étroits avec les autorités du Sud Kivu, surtout le Ministère de Mines. Leur soutien à l’entreprise lui est garanti par la prise en charge de frais de mission des agents étatiques et la distribution de pots de vin généreux. Dans le code minier et le règlement minier en vigueur, il n’y a pas de dispositions spécifiques qui réglementent explicitement l’exploitation par dragues. La règlementation par la voie d’arrêtés qui se contredisent mène à des confusions et empêche la formalisation de ce secteur. Au contraire, cette situation facilite aux autorités administratives, militaires et politiques de Bukavu à s’impliquer dans l’exploitation illégale des dragues. Une prolifération de prélèvements auprès des exploitants de dragues suceuses est observée dont la plupart n’ont pas de base légale. Le SAESSCAM exige 10% de la production et fait

recours à la force par des éléments des FARDC et de la Police de Mines pour les récupérer. Le SAESSCAM récolte environ 1,3 million de $US par mois auprès des dragues, dont 250 000 $US dans la zone Raia Mutomboki. Là, le SAESSCAM collabore étroitement avec les groupes armés pour réussir la taxation. Les prélèvements recueillis ne rentrent pour la plus grande partie pas dans les caisses de l’Etat Congolais et ces montants considérables ne contribuent pas au développement du Territoire de Shabunda. Le territoire manque de presque toute infrastructure et sa population souffre à nos jours d’une grande pauvreté. Non seulement le SAESSCAM collabore avec les Raia Mutomboki, mais aussi la Chefferie de Bakisi. L’autorité coutumière délègue même sa taxation par livret d’impôt aux groupes armés. Sur la production aurifère des dragues, elle récolte chaque mois une somme impressionnante d’environ 1,6 million $US où le sort de cet argent ne se laisse pas tracer et ne contribue pas au développement local.

Cette forte activité minière ne laisse l’environnement pas intouché et surtout l’utilisation importante de mercure est alarmante. Ni les exploitants, ni la population riveraine ne sont conscients des effets nocifs pour la santé humaine. Les services de l’état en charges, le SAESSCAM et la Division des Mines, manquent d’encadrer les exploitants artisanaux et mettent ainsi en péril les écosystèmes aquatiques et terrestres. En démontrant les inconsistances et les aberrances liées à l’exploitation aurifère par dragues à Shabunda, les auteurs de cette étude formulent des recommandations pour tous les aspects relevés dans ce rapport. Leur mise en œuvre est de plus haute priorité pour assainir la situation à Shabunda et arriver à une meilleure gouvernance du secteur minier à Shabunda.


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